Congo Business Case réalisé par le néerlandais Hans Bouma, le gagnant du Fipa d’or des Grands reportages, est exemplaire de ces bons sentiments que nourrit l’Occident à l’égard de l’Afrique. Ce reportage raconte l’histoire réelle de Daniel, un jeune hollandais qui part au Congo désillusionné par la façon dont se comportent ces grandes ONGs comme la FAO , l’organisation des Nations Unies contre la faim dont il fût salarié.
Daniel en a marre « de voir les légumes pourrir dans les champs alors qu’a moins de 200 kilomètres, en ville les gens crèvent de faim ». Il part donc en Afrique la fleur au fusil pour lancer une entreprise qui ferait le lien entre la campagnes et la ville : il achète du manioc, la transforme en farine et la vend au marché de la capitale. Mais les problèmes pratiques et d’ordre culturel s’accumulent et Daniel est forcé d’abandonner le projet. « T’es l’un des quinze fils d’une femme congolaise émaciée, t’es l’un des six choisis entre 300 demandeurs d’emploi, et tu te mets en grève… » dit-il en exprimant son amertume. Ces deux phrases entre guillemets prononcées par le protagoniste résument le film : les bonnes intentions et la dure réalité des faits.
Si d’une part Congo Business Case est une histoire typique d’un jeune qui veut sincèrement changer les choses dans « les pays pauvres »,et ceci avec une franchise dépourvu de ce narcissisme mal déguisé qui marque souvent ce genre d’aventures, il y a d’autre part quelque chose de nouveau ou plutôt de curieusement familier pour nous occidentaux dans ce film. Le jeune blanc qui part monter son business dans le sud ressemble curieusement à nos anciens colons partis faire fortune dans les colonies. Voilà pourquoi, au delà des mots de convenance ce film a plu autant. Pourquoi le nier, on assiste à un retour manifeste de l’esprit colonial en Europe qui se cache sous la feuille de figuier de l’humanitaire. Congo Business Case va dans le sens de l’histoire qu’on est en train d’écrire aujourd’hui.
La seconde raison du succès de ce film est linguistique : chauvinisme culturel aidant, un jury de France ne pouvait pas rester indifférent à un film où, pour une fois, le français et non pas l’anglais est la lingua franca entre un européen et des africains.
Le succès de Congo Business à Biarritz nous conduit à parler d’un autre grand reportage du même genre. AIDependance, est un film belge réalisé par Alice Smeets et Frederick Biegmann et qui dénonce justement la façon d’agir des ONG à Haïti. AIDependance, la dépendance de l’aide extérieure nous démonte de façon minutieuse le mécanismes par lequel les Organisations Non Gouvernementales détruisent le tissus social local et, comme le dit une femme haïtienne avec désespoir «réduit les pauvres à des camés et l’aide étrangère à de la cocaïne ». En même temps, ce film suit les traces d’un couple, Robi le haïtien et Sabina l’américaine qui vont dans les endroits les plus difficiles de l’île et proposent un exemple différent d’aide aux plus démunis.
Malgré leur différence Congo Business et AIDependance nous envoient le même message que l’on peut traduire ainsi : pour être efficaces, les actions humanitaires internationales doivent être conduits sous direction locale, par des gens du lieu, autrement c’est une mission impossible vouée au désastre.