Après l’interview d’Anne-Françoise Volponi, sociologue et membre de la PASSIM, Combats Magazine poursuit sa série d’entretiens sur les acteurs de la diversité culturelle en France et en Europe. Cette fois notre invité est Valère Corréard, directeur du département média au sein du Groupe SOS.
Combats Magazine: M. Corréard, vous dirigez le département média du groupe SOS, une coopérative qui regroupe plus de 12000 employés et 2000 structures dédiées à la santé, l’habitat, l’emploi… fondée durant les années 80. Quelle est la place du département média dans cette constellation de coopératives ?
Valère Corréard: Le groupe SOS est en réalité un groupement de différentes entreprises sociales. Nous ne possédons aucun actionnaire. Le département média est dirigé de manière singulière et cohérente au sein du groupe. Nous travaillons avec une équipe de journalistes professionnels avec qui nous produisons donc de l’information en toute légitimité. Notre ligne éditoriale est fondée sur les valeurs inhérentes au groupe. Notre volonté est de fournir de l’information de qualité à destination de nos lecteurs, auditeurs et autres internautes.
CM: Quel rapport y a-t-il entre le département média que vous dirigez et la diversité culturelle ?
VC: Le lien qui existe entre le département média et la diversité culturelle se fait essentiellement au travers de Respect Mag qui peut-être considéré comme LE média diversité en France. Ce dernier traite les questions concernant le mieux vivre ensemble. Notre volonté est ainsi de décloisonner, comprendre, partager et échanger sur ce thème. La diversité culturelle est un sujet extrêmement large que nous essayons de couvrir grâce nos différents médias tels que notre réseau de radio RAJE, UP le mag ou Respect Mag. Cette diversité culturelle s’impose donc naturellement à nous et nous nous devons de faire nos choix éditoriaux en fonction de ce sujet.
CM: Comment le Groupe SOS a-t-il pris les rênes de Respect Mag ?
VC: Je n’y ai pas toujours été présent. L’histoire de Respect Mag est celle d’une petite équipe qui porte un projet innovant sur bien des points mais qui rencontre malheureusement certaines difficultés économiques. Le groupe SOS a alors soumis l’hypothèse d’un rapprochement pour un soutien en mettant en place des dispositions d’excellence. Ce magazine présentait l’opportunité de se rapprocher des valeurs de ce groupe et fut donc intégré au groupe.
CM: Vous balayez divers sujets : actualités France et internationale, culture, témoignages d’individus et d’experts… comment définiriez-vous votre ligne éditoriale par rapport à l’ancienne lorsque ce magazine était payant ?
VC: La ligne éditoriale n’a, quant à elle, pas fondamentalement changé. Le changement s’est davantage opéré au niveau de la politique éditoriale. Désormais, notre approche est plus objective et moins militante. Le but étant de fédérer le plus grand nombre de lecteurs autour de ce média. Nous nous engageons dans le mieux vivre ensemble en parlant des différences afin de mieux les comprendre. Pour ce faire, nous abordons des sujets plus généralistes en se basant sur des tendances contemporaines et l’actualité. Notre souhait est donc de toucher le plus large public possible.
CM: Est-ce que des évolutions sont à prévoir ?
VC: Oui, dès ce printemps. Nous allons prendre un grand virage en direction du numérique. Nous allons développer une offre très ambitieuse, que cela soit au niveau du numérique ou de l’internet dit classique. Le magazine va effectivement changer de format, de mode de diffusion, de période de diffusion… Tout n’est pas encore défini, je ne peux pas tout vous dévoiler !
CM: Comment Respect Mag se distingue t-il des autres médias traditionnels ou en ligne ?
VC: A la différence du traitement traditionnel de la diversité culturelle dans les médias, nous nous efforçons de l’aborder sous un angle positif c’est-à-dire pas forcément à travers du fait divers. En revanche, nous pouvons le faire si certains événements nécessitent une certaine dénonciation. Nous avons plus à vocation d’expliquer, de faire la pédagogie. Nous pensons que toutes les formes de tensions intercommunautaires, qui peuvent déboucher sur des comportements inacceptables, sont le fruit d’une méconnaissance de l’autre. C’est pourquoi, nous tentons d’approcher la question de la culture avec des sujets constructifs, positifs et dynamiques pour en faire des sujets d’intégration. C’est dans ce sens que nous souhaitons nous démarquer.
CM: Comment définiriez-vous la diversité culturelle ?
VC: Pour moi, la diversité culturelle, c’est avant tout la culture. Il ne peut pas avoir de culture sans diversité. Le fait d’évoquer diversité culturelle sonne comme un doublon à mon sens. Mais ce terme possède néanmoins l’avantage de remettre l’accent sur un aspect de la culture au sens large. C’est en soi une telle nécessité de rappeler les véritables opportunités et richesse émanant du vivre ensemble !
CM: La diversité culturelle vous parait-elle bien traitée dans les médias ?
VC: Je crois que la façon de traiter la diversité culturelle est un mal français. Il y a une certaine incapacité des médias à traiter avec liberté et sérénité ces questions. Il réside une sorte de tension permanente. On a toujours peur du dérapage ou du mot de travers. Je suis un partisan de la liberté de parole. A force de se mettre des barrières, nous sommes en train de gonfler un abcès qui, à terme, pourrait éclater avec de tristes conséquences. En outre, trop peu de gens sont sensibles à ces questions de diversité, formant ainsi un genre de microcosme. La question est de savoir comment fédérer le plus de personnes. Pour cela il faut lancer le débat pour toucher les gens.
Jusqu’ici le débat sur la diversité s’est réduit à un combat frontal. D’un côté, un marché défendant becs et ongles la liberté d’entreprendre ; de l’autre des créateurs coalisés et soucieux de leurs droits. Votre sentiment ?
La Convention pour la Diversité Culturelle de 2005 est une charte qui a plus un but de sensibiliser, c’est une sorte de déclaration d’intention. Mais il reste intéressant de voir comment ces sujets sont pris en considération dans une logique de prise de conscience. Cependant, il reste encore un très gros travail sur ce sujet.