26 octobre, France-Inter, journal de 7h30 : C’est la société canadienne Bombardier et non le français Alsthom qui va construire les trains de banlieue franciliens.
Après qu’un responsable de Bombardier (France) a assuré que la production incombera « en-ti-ère-ment au site français ! », le journaliste conclut : « Tous les emplois seront-ils préservés ? C’est une vraie question ! »
Vraiment ?!
C’est une question, certes, mais en quoi est-elle « vraie » ?
En rien ! « Vraie », qui ici qualifie le mot question, signifie seulement que ce n’est pas une affirmation, une négation, une interro-négation, etc.,-c’est une question, quoi ! Le dire ne présente aucun intérêt, et telle n’était pas l’intention du journaliste.
Selon toute vraisemblance, ce qu’il entendait était : « Question pertinente ! » ou « Bonne question ! » ou « Voilà qui est intéressant ! » Mais il a dit « vraie » et, même si cette expression – une vraie question, un vrai sujet… – n’est désormais qu’une habitude dans la presse écrite et audiovisuelle, l’utilisation à tort et à travers de ce qualificatif n’est pas anodine : « vrai », qui veut dire 1) ce qui est conforme au réel, et 2) ce qui présente un caractère de vérité, est ici bien plus percutant que « pertinent » ou « bonne » ou « intéressant ».
Peu importe que ce qu’on nous dit n’ait aucun caractère de « vérité » – ou soit même carrément faux -, dès lors que nous sommes intrigués, mobilisés, galvanisés, voire inquiets, et que, notre curiosité étant piquée, nous achetons le magazine dit « d’information » ou restons branché sur tel flash d’infos ! Comme « le Bien » et « le Mal », la « vérité » fait vendre.
Outre qu’un mot est ici encore vidé de son sens à des fins mercantiles, plus grave est l’effet qu’ainsi galvaudé il peut, mine de rien, avoir sur les esprits. Ici, ne pas se poser cette vraie question, n’est-ce pas risquer de n’être pas informé ou, pire, d’être carrément hors du coup : de la réalité ? De la vérité ?
Christine Godbille