Discours prononcé par Abdelhak Kachouri, vice-président chargé de la citoyenneté de la politique de la ville et de la sécurité à la région IDF lors du Lancement de la première CVthèque au service des entreprises de l’ESS et des TPE/PME le 4 octobre dernier
Mesdames et Messieurs,
Je suis particulièrement heureux de me retrouver parmi vous ce matin, pour le lancement de la première CVthèque à destination des ESS, des TPE et des PME, notamment, et vous le savez tous, dans une période de turbulences économiques que notre pays traverse.
Si nous sommes ensemble et aussi nombreux ce matin, c’est parce que nous avons toutes et tous conscience que la situation de l’emploi est particulièrement difficile, mais elle l’est encore plus pour les jeunes issus des quartiers dits populaires, et surtout pour les moins qualifiés d’entre eux.
Quelques chiffres clefs pour illustrer mes propos :
Un jeune résidant en ZUS a 55% de risques en plus d’être au chômage
Un jeune issu de la diversité est deux fois plustouché par le chômage,
Un jeune étranger détenant un diplôme de l’enseignement supérieur est trois fois plus touché par le chômage que celui des autres actifs de niveau équivalent.
Et force est de constater que pour les femmes, la situation est encore plus compliquée : Une jeune femme a, toute chose égale par ailleurs, 24% de risque en plus d’être au chômage qu’un jeune homme.
Cette situation n’est pas acceptable, ce sont des talents que l’on gâche, des destins que l’on brise, des compétences réelles dont notre économie a décidé de faire l’économie.
Nous devons agir vite et ne pas sous-estimer l’ampleur de cette ghettoïsation de certains de nos jeunes qui finissent souvent pas être stigmatisés davantage en étant accusés d’êtres des assistés et de ne pas faire ce qu’il faut pour s’en sortir.
Certains vont dangereusement plus loin en affirmant que ces jeunes refuseraient de prendre l’ascenseur social préférant rester dans l’ombre au sous-sol !
En tant que fervent Républicain, tous ces propos scandaleux me sont insupportables. Ils ne font que renforcer le sentiment de peur, de suspicion et de xénophobie dont certains sont victimes.
Les dénoncer devant vous aujourd’hui n’est pas faire preuve de communautarisme. La critique est bien trop facile et contredit l’idéal républicain qui m’anime depuis de nombreuses années.
Aux détracteurs, je leur dis « ôtez vos œillères » et regardez les réalités telles qu’elles sont.
Oui, les jeunes de nos quartiers populaires ne sont pas les seuls jeunes en difficulté, ceux du milieu rural sont eux aussi concernés par le chômage qui frappe notre jeunesse. Mais, il faut bien avouer qu’ils sont devenus, malgré eux, une sorte de miroir grossissant du malaise de notre société.
Mesdames et Messieurs,
Sans doute que mes propos dépeignent un tableau noir et sévère, mais, ne vous y trompez pas, je crois en l’avenir et je crois aussi au potentiel de notre pays et plus particulièrement de notre région. Ce potentiel doit permettre de sortir de ce cercle vicieux pour être capable de changer le regard de notre société, en faisant preuve de volonté et d’innovation.
J’ai conscience de l’ampleur du travail qu’il nous reste à accomplir,
J’ai conscience que seuls, les pouvoirs publics sont bien démunis.
Aussi, avant de parler des défis communs, je souhaiterais rendre un hommage tout particulier, à ces femmes et ces hommes qui, sans relâche, font vivre au quotidien notre tissu économique, composé pour l’essentiel de TPE/PME et plus récemment d’Entreprises d’économie sociale et solidaire.
C’est notamment le défi qu’a décidé de relever le Mouves en réunissant des entrepreneurs sociaux, autour de valeurs, pratiques, et d’une volonté commune pour aboutir à une économie plus juste et plus humaine.
Ces entreprises sont, sans conteste, un formidable potentiel pour un territoire comme le nôtre.
Mesdames et Messieurs les entrepreneur-es des TPE/PME,
Votre capacité à innover, est un atout formidable pour nous, pouvoirs publics. On oublie peut-être trop souvent que les petites et moyennes entreprises sont plus innovantes et bien plus soucieuses de nos défis sociétaux qu’on veut bien le dire. Aussi, votre présence de ce matin, est importante, elle est la preuve de votre engagement à nos côtés pour « un mieux vivre ensemble » et cela malgré la conjoncture économique actuelle.
Faut-il encore rappeler que les efforts des dirigeants comme des salariés des PME ont aussi permis de conserver des emplois ?
En effet, pour la seule année 2009, alors même que leur chiffre d’affaires reculait de 5,4%, la masse salariale des PME est restée quasiment stable. Et je ne parle pas des chiffres relatifs à la création d’entreprises qui sont tout aussi éloquents.
Mais, si ce constat est déclencheur d’espoir, il l’est d’autant plus avec le travail des structures de l’Economie Sociale et Solidaire, véritable symbole d’une mutation profonde de notre société.
En donnant la primauté aux personnes sur la recherche des profits, elles ont su créer une organisation autour d’une solidarité collective centrée sur l’utilité sociale.
Elles sont devenues un acteur économique de premier plan et font preuve d’exemplarité.
Elles sont devenues un acteur économique de poids, puisqu’elles emploient près de 2 millions et demi de salariés et distribuent chaque année plus de 50,5 milliards d’euros de masse salariale.
Ainsi, elles sont devenues des modèles de réussite à suivre en remettant l’humain au cœur de l’économie de demain.
Mesdames et Messieurs,
Bill Drayton fondateur d’Ashoka écrivait : « Une grande idée est la ressource la plus puissante au monde, mais uniquement si elle est entre les mains d’un bon entrepreneur. Cela peut faire bouger le monde. »
Comme vous le savez depuis quelques années, l’Economie sociale et solidaire permet de faire émerger au sein de notre société une nouvelle espèce – si j’ose dire- d’entrepreneurs qui jour après jourau travers d’un travail organisé de leadership réinvente une société plus équitable.
Ces entrepreneurs d’un nouveau genre sont souvent des individus décrits comme curieux, prenant des risques, visionnaires, créatifs et ambitieux. Et aujourd’hui, nous avons la chance d’en avoir au moins un à nos côtés, qui pendant de nombreuses années a su convaincre et mobiliser des individus autour de lui pour qu’enfin les jeunes de nos quartiers puissent espérer un avenir qui corresponde à leurs nombreux talents !
Je veux ici saluer le travail exceptionnel de Saïd Hammouche, je veux lui rendre un hommage particulier, car en tant que Vice-président de la Région Ile-de-France, je peux vous affirmer que son engagement, son enthousiasme, sa force de persuasion et sa pensée innovante – portée également par toute son équipe, Esthelle Barthélémy, Noémie Grignon et tant d’autres- nous permettent d’appréhender autrement notre politique régionale.
Mesdames et Messieurs,
Nos politiques publiques, qu’elles soient nationales ou plus locales, doivent faire preuve d’audace et d’imagination pour faire reculer le chômage. Deux constats doivent nous tenir en alerte et nous pousser à agir encore plus vite en créant des passerelles entre les jeunes, les entreprises et les pouvoirs publics:
D’une part, un secteur économique trop mouvant avec une augmentation très nette de jeunes « travailleurs pauvres »
D’autre part, l’existence d’un paradoxe français : celui de la coexistence d’un chômage élevé avec un déficit de recrutement dans certains secteurs.
Si la Région Ile-de-France a fait de sa priorité la réussite de nos jeunes par l’Education, la lutte contre le décrochage, la qualification du plus grand nombre; elle ne s’arrête pas là et souhaite aller plus loin, notamment en faveur de l’égalité réelle et plus particulièrement en faveur de l’Egalité Femmes-Hommes dans le milieu professionnel.
J’en profite pour saluer la présence de l’équipe du Centre Hubertine Auclert, centre de ressources francilien, présidé par Djénéba Keita, qui agit activement, en faveur des franciliennes et aussi aux cotés des entreprises qui souhaitent mener une politique d’exemplarité sur les problématiques liées au genre.
Au Conseil régional d’Ile-de-France, nous avons très vite pris conscience que nous pouvions compter sur nos entrepreneurs dynamiques pour soutenir nos politiques publiques. mais pour cela il nous faut les accompagner en leur offrant des outils innovants capables de récréer un cercle vertueux, un « bouclier » protecteur pour gagner les défis de demain et la bataille contre les stéréotypes qu’ils soient liées au genre, à l’origine, à l’adresse, aux orientations sexuelles ou encore au handicap. C’est le sens du rapport voté par l’ensemble des élu-es au mois de Février dernier, au Conseil Régional d’Ile-de-France.
Je salue à cet effet, la présence de Mounir Satouri, Président du groupe d’Europe Ecologie les Verts qui a largement contribué à la réussite de ce nouveau dispositif cadre qui a pour ambition de mettre en place :
Une politique régionale incitative, pour une meilleure responsabilisation sociale ;
Une politique régionale prioritaire, vers les formes de discriminations les plus récurrentes ;
Une politique régionale innovante pour lutter contre toutes les formes de discriminations qui émergent et qui ne sont pas prévues par la loi ;
Une politique régionale d’expertise pour une meilleure connaissance des phénomènes discriminatoires.
Une politique régionale renforcée en interne, pour une meilleure coordination avec la création de l’Agence Régionale Pour l’Egalité Réelle, Présidée par Caroline Mécary.
Pour que ces nouvelles politiques puissent avoir du sens, tous les acteurs économiques doivent devenir ou redevenir des partenaires solides capables de trouver des solutions réunissant tolérance, accompagnement et co-construction.
Pour que cela fonctionne, les engagements doivent être multiples : engagements de l’Etat, engagements des entreprises (à but lucratif ou non) et engagements des collectivités territoriales.
La relance de notre pays est, aussi, à ce prix.
Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs, je me réjouis d’être parmi vous ce matin. Cette rencontre est le reflet de Notre volonté de reconstruire ensemble des perspectives d’avenir.
Je remercie très chaleureusement, Monsieur Le Ministre pour cette belle initiative, pour ce bel esprit de co-construction que nous offrons à nos concitoyens.
Monsieur Le Ministre, cher Benoit, je te connais depuis quelques années déjà.
Je sais l’engagement qui est le tien, pour faire de notre société, une société plus juste et plus sereine.
Je sais, ton dévouement pour servir cette cause, jour après jour, pour redonner à notre pays toutes ses couleurs.
Je sais enfin, ton combat de tous les instants pour faire bouger les lignes et faire évoluer les mentalités afin que l’égalité de traitement ne soit plus juste une théorie mais un véritable combat à mener au quotidien au travers d’actions toujours plus innovantes.
Le lancement de cette CVthèque, qui nous rassemble aujourd’hui, marque le premier acte de cette nouvelle dynamique commune.
Vous le savez autant que moi, les stéréotypes ne disparaissent jamais tout seuls, Pour changer les mentalités, il faut savoir utiliser tous les leviers possibles.
Et le partenariat renforcé que nous avons souhaité mener avec Mozaik RH, en est bien la preuve. Ce partenariat est ambitieux. Au-delà de la cvthèque, il a pour objectifs :
D’identifier, de coacher et d’accompagner le vivier de talents de notre territoire,
D’agir en faveur de l’orientation, en particulier en matière de féminisation des métiers, avec la mise en place des mini-bilans de compétence à destination des lycéens et des lycéennes,
De développer l’impact social par le biais d’antennes locales au cœur des quartiers populaires. Pour ce faire, la Région Ile-de-France permet le financement d’étude d’opportunités sur les bassins d’emploi franciliens, le recrutement d’un coordonnateur ou d’une coordinatrice locale, la formation de celui-ci ou de celle-ci ainsi que l’équipement de l’antenne.
La Région Ile-de-France à travers la volonté et l’énergie de Jean Paul Huchon se félicite d’avoir cru en l’équipe de Mozaik RH, et d’avoir été un maillon essentiel dans le partenariat avec le Ministère de l’Economie sociale et Solidaire et de la consommation.
Mesdames et Messieurs,
L’égalité, n’est pas un mot banal, une devise superflue. C’est ce qui nous rassemble aujourd’hui. C’est d’abord un héritage commun et surtout une espérance à partager.
C’est ce que nous démontrons ici avec audace, solidarité et ténacité. Bravo à tous.
Je vous remercie et cède la parole à Monsieur Mezziouane.